Entre 1896 et 1901, la revue « Hyperchimie », dirigée par l’alchimiste Rosicrucien et Martiniste François Jollivet-Castelot, fut l’organe de presse officielle de la Société Alchimique de France. Chaque mois, elle proposait à ses lecteurs de découvrir des articles sur l’alchimie, l’hermétisme, la médecine spagyrique, le symbolisme ou encore les grandes traditions. L’équipe éditoriale était composée de grands noms de l’occultisme de cette fin de siècle, tels que Sédir, Charles Barlet, Papus et Marc Haven, pour ne citer qu’eux.
Nous avons sélectionné dans nos archives cet article extrait de la revue n°11 de novembre 1898, intitulé « La Chaîne de Vie ». Ce texte, qui se place sous la plume de la Rédaction sans préciser son auteur, expose une conception du monde chère à François Jollivet-Castelot, qu’il ne cessera de défendre toute sa vie et que l’on retrouve également dans l’Ontologie des Rose-Croix : l’univers est vivant ; une Volonté s’exprime à travers la nature ; la Vie chemine à travers les différents règnes au moyen de l’évolution dans le but retrouver l’unité au sein de la Divinité.
« La Chaîne de Vie »
L’Hyperchimie n°11 – troisième année | Novembre 1898
« L’Occultisme est formel sur ce point : Tous les êtres de l’Univers – affirme-t-il et démontre-t-il – sont frères, constituent une chaîne indéfinie d’organismes aux anneaux étroitement reliés. Une évolution parfaite règle l’emboîtement des incarnations et des manifestations vitales. Depuis la particule d’Ether, depuis l’atome – en passant par le Minéral, le Végétal, l’Animal, l’Homme, ici-bas – jusqu’à l’angélique esprit progressant encore, mais sur des contrées paradisiaques de l’Espace, l’échelle de Jacob dresse ses multiples échelons, comme Darwin eut la gloire de le prouver pour une portion du Monde : pour les espèces terrestres de notre petit globe.
Tout vit et tout s’enchaîne, tout évolue ! Nulle solution de continuité le long de la spirale de Vie incessamment transformée, renouvelée, perfectionnée, en éternelle ascension vers l’Absolu de l’Idée divine qui se mue en un perpétuel Devenir.
Des liens indissolubles, un lent transformisme que révèlera peu à peu au Public la Philosophie Hermétique, rattachent toutes les cellules de l’Univers, c’est-à-dire par conséquent TOUT CE QUI EST.
Immense, splendide Synthèse comprenant l’Être Intégral, que les diverses religions appellent Dieu, mais que les vrais penseurs ne nomment point, car il est l’Infini insondable et vertigineux.
Les myriades de Soleils entourés de planètes, formant la Voie lactée, les innombrables systèmes d’Univers manifestés par les nébuleuses pâles – fourmillent, centres ardents et magiques, d’êtres incalculables, durant l’Éternité de la Volonté créatrice. Ces particules du Grand Corps de l’Adam Kosmique, complémentaires l’une de l’autre, suivent une filiation ininterrompue depuis les Origines mystérieuses.
Le Grand Être vit de leurs existences, s’alimente de leur Palingénésie, de leur trépas et de leurs renaissances.
L’Astral les combine, les alchimise dans leurs essences aux passages en son sein, puis les projette en de nouvelles incarnations jusqu’à ce que, délivrées de l’Illusion, ayant accompli leurs tâches, elles s’élèvent aux sphères aromales, définitivement, proches du Nirwâna.
Et ces univers astraux et spirituels – dont le matériel est le reflet – se pénètrent, s’emboîtent, pénètrent le Monde le plus grossier des Formes épaisses, mayâviques. Un échange continuel, un va et vient de phénomènes, s’effectue entre les trois plans de la NATURE.
Il n’en saurait être autrement, puisque la VOLONTÉ qui constitue le pivot, la semence et la fin de tout l’Univers – son Essence – cette Volonté à pour principe : l’UNITÉ. Les aspects, les apparences, les divisions, ressortent du domaine de l’Illusion n’offrent aucune réalité.
L’Essence est unique, identique, au travers de toutes les représentations cosmiques vaines. Seule la Volonté se cherche et se trouve au tréfond des formes et des mondes.
L’Identique apparaît donc sous les masques changeants de la Nature ; et ceci nous amène à proclamer la belle Loi d’amour et de solidarité entre tous les êtres constitutifs de l’Unité. »